Luís Vicente : trompette
Théo Ceccaldi : violon, alto
Valentin Ceccaldi : violoncelle
Marco Franco : batterie
Théo Ceccaldi : violon, alto
Valentin Ceccaldi : violoncelle
Marco Franco : batterie
Cela fait quelques années que les musiciens portugais Luís
Vicente et Marco Franco se croisent et collaborent avec les frères Ceccaldi.
Deux Maisons est un quartet dont il a existé (peut-être existent-elles encore
d’ailleurs) quelques variantes, sans batterie avec le guitariste Marcelo Dos
Reis ou avec, en lieu et place du violoncelle de Valentin Ceccaldi, la contrebasse
de André Rosinha. Rien d’inhabituel quand on suit un peu les aventures des
membres du Tricollectif. Avec une poignée de musiciens on fabrique un tas de
groupes. Et à chaque fois… Bing ! Le trompettiste et le batteur
s’inscrivent dans cette logique, que montrent les résultats obtenus en liant
leurs noms sur un moteur de recherche.
Deux maisons, donc, une en France et une au Portugal. Deux
maisons mais une seule famille, c’est évident. On entend là une parfaite
cohérence, non dans l’expression à proprement parlé, mais dans la mise en place
collective d’une musique travaillée à chaud selon des schémas de mise en
tension imprévisibles. Les échanges sont vifs, c’est instable, audacieux. Les
différences deviennent complémentarité et le tout s’équilibre avec atypie. Par
exemple, Marco Franco joue beaucoup sur les effets de foisonnement, en restant parfois très centré sur ses toms,
mais « prive » son jeu de rythme et de motricité, privilégiant une
sorte d’illustration par le grondement que contrebalance les lignes vagabondes
et mélodiques du violoncelle. A l’archet où au doigt, Valentin Ceccaldi amène
le mouvement, la circulation des masses. De la même manière, Théo Ceccaldi
phrase avec aplomb et construit un discours sur la longueur, en jouant avec les
répétitions, les motifs appuyés, l’alternance de séquences basées sur le travail
du son et d’envolées mélodiques (son solo étonnant durant les premières minutes
de « Two Living Rooms » est à ce titre un modèle de logique
narrative) tandis que Luís Vicente essaime des interjections laconiques en
forme de ponctuation ou de commentaire, avec ici et là des interventions plus étendues
caractérisées par une langueur distante. Les inflexions du violon sont graves,
orageuses, celles de la trompette chargées d’une jovialité vacillante.
L’interaction ne tire donc pas comme souvent sa force de la coagulation d’énergies
circulant vers le même point de fuite, mais de contrastes qui s’équilibrent à
la manière de différents éléments d’un mobile, à première vue disparates. Il y
a aussi, tout au long du disque l’ambivalence entre les formes incertaines de
la musique improvisée et les textures soyeuses émanant des cordes, violon et
violoncelle se livrant régulièrement à l’exercice de la musique de chambre
impromptue, ce qui confère à des pièces comme « Two Balconies » où
« Three Bathrooms » une dimension profondément lyrique que relèvent
les écorchures de la création instantanée.
Paru sur le label Clean Feed, For Sale est un disque bouillonnant et créatif. De notre
chez-nous, il offre en outre une vue dégagée sur une autre maison, celle d’une
scène portugaise que je méconnais mais qui m’attire au même titre que tous les
collectifs, groupes et musiciens qui de par le monde continuent de casser les
murs pour reconstruire des passerelles avec leurs pierres. Homes, sweet homes.
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