Emile
Parisien : saxophone soprano
Geoffroy Tamisier
: trompette
Gueorgui Kornazov
: trombone, compositions
Manu Codjia :
guitare
Marc Buronfosse :
contrebasse
Karl Jannuska :
batterie
Parfois, on détecte à droite à gauche des éléments qui
annoncent l’arrivée d’un album, et l’on se met à chasser les indices, pour peu
que le disque en question nous fasse saliver. Le précédent disque de Gueorgui
Kornazov (Viara), avec sensiblement le même effectif, m’avait tant séduit que le
visionnage de vidéos de concerts sur le net ainsi qu’une annonce proclamant la
survenue imminente de Sila sur le label BMC avaient placé ce disque dans ma
top-list des choses musicales attendues. Malheureusement, les choses étant ce
qu’elles sont, le chemin conduisant la musique du tromboniste des studios
jusqu’à nos oreilles fut plus long que prévu. Le cauchemar du mélomane
impatient, et, on peut le supposer, des musiciens pressés de partager leur
réalisation.
Fort heureusement, l’album est enfin disponible. Et il est tout
simplement magnifique. Sila. En bulgare, cela veut dire force, et le sextet
s’emploie à en donner des illustrations sonores sous la forme d’une longue
suite au sein de laquelle des thèmes splendides se succèdent et/ou se
transforment, un peu à la manière des mélodies orchestrées de plusieurs façons
dans les musiques de films. On retrouve évidemment la patte de Kornazov, cette
écriture éminemment mélodique où les thèmes restent perceptibles, en filigrane
des développements improvisés de manière naturelle. Ici ces thèmes ne sont
jamais loin, ils passent d’un instrument à l’autre, se reflètent et ricochent, sont repris par la contrebasse
pour devenir une cohérente ligne de soutien. L’arrivée dans le groupe de
Geoffroy Tamisier, en plus d’ajouter à l’effectif déjà somptueux une voix
chargée de poésie, permet de multiplier les recours aux canons et de permettre
à deux instruments à vent de maintenir une interprétation orchestrée des thèmes
tandis que le troisième s’exprime sur la trame ainsi nourrie.
Comme pour ses disques précédents, le tromboniste a veillé à
ce que chacun puisse laisser libre court à sa propre fantaisie, et il s’avère
que chaque discours s’inscrit avec naturel au sein d’un propos collectif très
typé, marqué par le goût de Kornazov pour les mélodies simples caractérisées, à
travers leur lyrisme et leurs fragrances bulgares, par un délicat mélange de
nostalgie et de gaieté. L’alternance, ou plus précisément l’imbrication des
thèmes, des passages atmosphériques et des percées individuelles fait que
chaque minute compte, la logique narrative nécessitant que le sextet prenne le
temps de mettre en place des couleurs orchestrales favorisées par les alliances
de timbre des instruments à vent, les harmonies célestes de Manu Codjia et la pointilleuse
manière qu’a la section rythmique de s’effacer tout en jouant un rôle
évidemment capital dans l’instauration des dynamiques appesanties. Comme tout
est question de variations d’énergie, les différentes parties de la suite sont
autant d’occasions de varier l’intensité du jeu, faisant de cette captation
live un véritable récit. Nombreux, donc, sont les passages où la musique
éclate, jaillit, portée par des rythmes puissants et nourrie par des solistes
habités.
L’écoute de ce disque puissant et émouvant est une des
belles choses dont il serait dommage de se priver en ce début d’année. Il y a
là de quoi sourire et rêver. Si vous le
croisez au détour d’un rayon, je vous conseille de vous ruer dessus. Mais la
façon la plus sûre de se le procurer est de s’adresser directement au
tromboniste. Vous pouvez lui envoyer un mail (gueorgui.kornazov@gmail.com) pour
commander cet album qui, pour le coup, nous en donne, de la force.
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