Marc Ducret : guitares
Kasper Tranberg : trompette, cornet
Simon Toldam : Moog, Juno 60, Philicorda
Peter Bruun : batterie, Mikrokorg
Avec son groupe All Too Human, le batteur dannois
Peter Bruun réussit une collision des univers qu’il développe à travers ses
différents groupes. Sans faire une discographie détaillée du monsieur,
rappelons, puisque ces ascendants ont sens à être cités ici, sa participation
au trio de Samuel Blaser, au sein duquel il joue avec Marc Ducret, ses groupes
de jazz contemporains comme Spring, WBZ et Buffalo Age (dont fait partie Kasper
Trandberg), ou encore son groupe pop Eggs Laid By Tigers, dont l’identité
sonore doit beaucoup aux synthétiseurs de Simon Toldam. Rappelons aussi que
Marc Ducret avait fait appel aux bons services du batteur et du trompettiste
pour le premier volume et le final en live de sa grande œuvre Tower.
De par les musiciens dont il est constitué, ce nouveau
quartet est donc un assemblage, ou plutôt une réunion, de compagnons de routes
avec lesquels les affinités musicales se sont renforcées, dans des directions
différentes. La magie de Vernacular Avant-Garde est précisément d’être un disque à la
croisée des chemins, qui combine la sophistication d’un jazz que le batteur
aborde volontiers avec une certaine radicalité, notamment dans son rapport à la
mélodie, et les couleurs chatoyantes d’une pop qui semble en outre n’appartenir
qu’à lui. « Sunshine Superman » et son développement fortement basé
sur l’interactivité montre que ces directions ne sont, loin de là, pas
opposées.
Le quartet impose une signature sonore très personnelle
ainsi qu’une grande originalité dans le « storytelling » des 6
compositions, avec de nombreux changements de climats et d’intensité, qui
s’appuient toujours sur la capacité des membres du groupe à mener des parties
de lead passionnantes comme de participer à une toile de fond où se conjuguent
souvent les à-plats aux couleurs bigarrées et les mises en place rythmiques
ciselées.
Ainsi on comprend dès les premières mesures de « Follow
Me » que ce disque ne sera pas comme les autres. On y passe d’un groove
puissant avec des orchestrations sophistiquées à un épisode onirique avec une
guitare rêveuse, des percussions éparses et des claviers qui apparaissent comme
la lumière de l’aube.
Chaque titre aura son propre schéma narratif. Schémas
narratifs parfois linéaire, comme sur « Extended Mind » ou un rythme
puissant vient se poser sur des riffs de claviers répétitif tandis que Marc
Ducret emporte le titre, avec son beau phrasé, dans une sorte de far ouest où
les territoires semblent infinis, ou comme la lente montée de « All Too
Human », avec un thème alangui soudainement mis en perspective par la
guitare et qui précède un beau solo aérien de Kasper Tranberg sur fond de
nappes étranges jouées par Simon Toldam.
Certains schémas narratifs sont en revanche plus accidentés,
à l’image du puissant « Vernacular Avant-Garde », nervuré de décharges
collectives saturées et qui abrite en son sein une longue partie centrale
suspendue, ou à l’image encore de « Is That So Sir Names ? », avec
sa juxtaposition complexes d’éléments rythmiques qui s’emboitent par
sorcellerie, jusqu’à un point ou tout se cale, pour mieux voler en éclats
presque instantanément. Là se loge l’épisode le plus improvisé, où l’on voit
que le groupe conserve sa singularité jusque dans l’effusion. Assez vite, le
montage rythmique s’installe de nouveau, s’étiole, pour enfin s’installer
définitivement, puis enfler le long d’un final épique, point d’orgue d’un
disque puissant, inspiré et d’une grande originalité.
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