Gérard Marais : guitare
Jérémy Ternoy : piano
Henri Texier : contrebasse
Christophe Marguet : batterie
Gérard Marais est un musicien rare. Cela faisait un moment
qu'il n'apparaissait plus sur nos radars. Il nous revient avec un disque tranquille et
régi par le feeling, enregistré en quartet avec son compère Henri Texier, qui
tenait la contrebasse sur plusieurs albums antérieur du guitariste, Christophe
Marguet et Jérémy Ternoy. On ne refera pas l'histoire des liens que tissent ces
différents musiciens, leur musique est suffisamment parlante.
Inner Village est une apparition. Gérard Marais y propose
neuf pièces composées et interprétées avec goût. La musique s'écoule
sereinement, malgré une introduction sur les chapeaux de roues où le tandem
Texier /Marguet impose une rythmique puissante qui semblera familière à
beaucoup. Très rapidement, avec l'arrivée du beau thème de ce morceau, une
mélodie faussement simple qui rend justice aux talents de compositeur du
guitariste, la souplesse s'installe, pour ne plus s'effacer. Les quatre
musiciens jouent tout au long de l'album avec retenue, et l'expression
collective est plus régie par la souplesse que par la tension. Jérémy Ternoy
fournit un accompagnement moelleux et prend de beaux solos durant lesquels il
construit de longues phrases sinueuses et élégantes. Il partage avec Gérard
Marais cette approche patiente de l'expression soliste qui rend les
interventions parfois discrètes, à l'inverse de solistes qui attirent
l'attention par un large déploiement de moyens et d'énergie. Ici, les deux
instruments entretiennent une relation équilibrée, l'un soutenant l'autre par
des successions d'accords délicats qui facilitent le développement horizontal
des solos, ce qui en accentue la dimension mélodique. La contrebasse d'Henri
Texier apporte un support solide et chantant, ses lignes caractéristiques
favorisant la limpidité du son d'ensemble tout en apportant comme de coutume
profondeur et robustesse. Aérée autant qu’inventive, la batterie de Christophe
Marguet offre une pulsation qui épouse les intentions collectives, les oriente
à l’occasion, et confère au son d’ensemble une légèreté qui sied à l’esprit du
guitariste.
La musique est nourrie d’influences diverses, qui cohabitent
intelligemment dans un propos dont la cohérence doit beaucoup à la manière que
le quartet a trouvé de chanter. La musique circule beaucoup quand cela joue
bop, la rythmique, jouée au fond du temps, emballe sereinement le jeu sur les
morceaux binaires, et la clave de la musique latine suggère la danse.
Soigneusement, les clichés sont évités, les lieux communs contournés. Ces
ingrédients, souvent utilisés à outrance et sans émotion (notamment par les
boppers qui avaient à mon sens souvent du mal à être aussi convaincants sur
leurs morceaux aux influences cubaines, même si des centaines d'exemples me donnent tort), servent ici une recette toute
personnelle. Inner Village est un disque beau et authentique. Inutile de
chercher chez Gérard Marais l’inouï ou l’expérience extrême. Il faut y venir,
justement, parce que sa musique est simple et délicate. Elle est aussi, en
conséquence, délicieusement addictive.
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