Fabrice Martinez : trompette et bugle
David Chevallier : guitare
Bruno Ruder : piano et Rhodes
Yves Rousseau : contrebasse et composition
Christophe Marguet : batterie et composition
Yves Rousseau et Christophe Marguet, outre qu’ils sont tous
deux de passionnants musiciens, sont aussi de véritables faiseurs de musique,
des compositeurs ayant chacun une signature mélodique identifiable et une égale
exigence dans le soin qu’ils apportent à la constitution de leurs orchestres.
Après avoir longtemps joué ensemble au sein du quartet (extansible) du
contrebassiste, les voilà co-leaders d’un quintet tout neuf au sein duquel on
retrouve, avec plaisir, le trompettiste et bugliste Fabrice Martinez, le
pianiste Bruno Ruder et le guitariste David Chevallier.
La section rythmique s’attache à impulser sur le plan formel
une énergie qui se déploie dans l’intensité ou la sensualité, mais c’est
également d’eux que vient la musique, et le moins que l’on puisse dire, c’est
que le répertoire proposé rend justice à leurs qualités d’écriture. Elles ne
sont pas nouvelles, il suffit de se rapporter à leurs réalisations personnelles
passées pour s’en assurer, mais ils sont tous deux parvenus à proposer un
ensemble homogène constitué de pièces marquées par la délicatesse teintée de
nostalgie du batteur, ou par les figures obsédantes qui caractérisent souvent les compositions du contrebassiste. Si cette
matière première est en elle-même remarquable, la manière qu’a le quintet de
s’en emparer force l’admiration, avec une musique centrée mais un jeu collectif
très ouvert que chacun façonne, non à grands coups de solos ravageurs (même
s’il y en a), mais en privilégiant un travail sur la complémentarité des
timbres et des placements. A ce titre, l’intelligence avec laquelle cohabitent
Bruno Ruder et David Chevallier est exemplaire, les riffs, progressions
d’accords et ornements s’organisant avec beaucoup d’évidence et d’esprit.
Christophe Marguet comme Yves Rousseau ont souvent
privilégié le saxophone pour incarner la voix de leurs projets personnels. Le
rôle est ici confié à Fabrice Martinez, qui fait une nouvelle fois preuve d’un
goût très sûr dans le choix de ses notes et la maîtrise de ses sonorités, ce que
révèle entre autres le poignant morceau « Pénombre » sur lequel le
groupe accompagne sobrement la trompette, écorchée. Le choix d’associer le
piano (ou Rhodes) et la guitare montre aussi une volonté de pouvoir multiplier
les propositions en terme de couleurs, et d’intensité. Une large gamme de
possibilités qui va de l’effusion de « The Cat » aux délicates
interventions en volutes des deux musiciens sur « Bleu nuit ».
Le son définit du groupe autorise en outre beaucoup de
libertés dans le déploiement des formes. Les morceaux sont parfois construits
autour de schémas rythmiques forts, comme le groove puissant de
« Fragrance », que Bruno Ruder chevauche avec beaucoup de fantaisie,
où la pulsation entêtante de « Marcheur », un titre magnifique et
souple que David Chevallier perturbe de sa guitare foisonnante. Ailleurs se
sont des développements plus aériens qui sont privilégiés, comme le poétique
dyptique « Light And Shadow » ou « Day Off », un morceau du
contrebassiste sur lequel le groupe gagne progressivement en épaisseur,
apportant au passage une tension inattendue. Une apparente hétérogénéité dans
l’architecture comme dans le recours aux moyens, donc, mais une entière
cohérence sur l’ensemble du disque,
marqué comme son nom l’indique par l’esprit de la danse, l’esprit du
jeu. En témoignent le très beau « Le vent se lève » qui rappelle,
personne ne s’en plaindra, l’esthétique de l’album Constellation, ou encore
« Spirit Dance », une pièce sur laquelle le quintet s’offre un bel espace d’expression.
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