Daunik Lazro : saxophone baryton
Benjamin Duboc : contrebasse
Didier Lasserre : caisse claire et cymbales
Benjamin Duboc : contrebasse
Didier Lasserre : caisse claire et cymbales
Dernière production du label Dark Tree, dont la ligne
éditoriale sans concessions et la constante qualité de production forcent le
respect, Sens Radiants est un de ces délices musicaux prompts à émerveiller
l’auditeur pour peu qu’il soit sensible à l’expression musicale instantanée et
les curieux voyages qu’elle fait naître.
Sens Radiants est le nom du disque, mais aussi celui du seul
morceau qu’il contient, une longue et délicate plongée dans l’univers conjoint
des trois improvisateurs qui lui donnent naissance. Comme les rêves, cette
musique doit se vivre en solitaire, puis se partager a posteriori. Car elle est
aussi belle qu’exigeante. Cette musique imprévisible, aux contours un peu
flous, aux formes insaisissables, n’est aucunement difficile d’accès. Elle
demande simplement qu’on lui consacre une heure et un peu plus, car il est
recommandé de se vider la tête pour l’accueillir, et de prévoir un peu de temps
après son écoute pour la laisser exister sur le silence, comme une lumière vive
s’imprime sur la rétine pour prendre le temps de se fondre sans heurts dans le
noir profond des paupières closes.
Cette musique est délicate, oui, car elle est intime. Ni
chambriste, ni minimaliste, ni intimiste. Intime, dans le sens où on perçoit à
travers les gestes des musiciens mais aussi à travers leurs effacements une
sensibilité qui les amène à effleurer le silence, à y déposer leurs sons comme
l’artiste peintre frôle sa toile blanche du bout du pinceau, pour ne pas la
tâcher. Souvent les instruments se taisent. Souvent, ils murmurent. Puis, dans
un élan partagé, ils se joignent et affirment leurs présences, non pour
s’imposer mais pour respecter le grand vide en y plongeant sans retenue.
Benjamin Duboc et Didier Lasserre jouent beaucoup ensemble.
Ils ont enregistré de nombreux trios, avec entre autres Christine Wodrascka, Henri Roger, Jobic Le
Masson, Abdelhaï Bennani où Ly Thanh Tiên. Tous deux pratiquent sur leurs
instruments respectifs des plongées abyssales au cœur du son, mettent en place
des séquences tirant profit du travail minutieux des énergies, des vibrations
et des effets d’adjonction des notes et des harmoniques impalpables. Comme
Daunik Lazro, dont on redécouvre de projet en projet la propension à creuser
son sillon, développe au saxophone baryton une poétique des sons allant
également dans ce sens, le trio est parfaitement cohérent, les épisodes en
solo, duo ou trio trouvant naturellement leur place au cœur de ce long
développement, cette lente éclosion qui atteint son paroxysme dans la belle envolée
dramatique qui la conclue.
En marge de ce disque atypique et passionnant, on rappellera
ici que les trois musiciens avaient déjà enregistré ensemble (Pourtant la cime
des arbres pour le même label), et ont récemment sorti des albums en solo
absolu qui mettent en exergue la rigueur de leur travail et la plastique
singulière de leurs discours respectifs.
Daunik
Lazro : Some Other Zongs (Ayler Records)
Benjamin
Duboc : St James Infirmary (Improvising Beings), Primare Cantus (Ayler Records)
Didier Lasserre : La mémoire (. Entre deux points.)
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